Un chacal doré photographié à Morcles
Une lectrice extrêmement chanceuse a observé un chacal doré sur les hauts de Lavey, dans le canton de Vaud en Suisse. Ce petit canidé venu spontanément du sud-est de l’Europe, n’a été observé qu’à 20 reprises en Suisse depuis les premiers indices de sa présence en 2011.
Trop petit pour être un loup, trop grand et trop gris pour être un renard… Mais quel est donc cet étrange animal avec lequel Véronique Bonnard est tombée nez à nez vendredi dernier en rentrant du travail ? « Il était 20h30, je remontais la petite route en direction de Morcles lorsque j’ai senti une forte odeur de putréfaction par la fenêtre de ma voiture. C’est alors qu’une sorte de petite louve est sortie des fourrés et s’est figée devant moi, comme surprise de me voir là. Je pense que je l’ai dérangée en plein repas, raconte la Vaudoise. Ni une, ni deux cette passionnée de nature saisit son téléphone portable et immortalise la stupéfiante rencontre. « L’animal s’est ensuite redirigé vers la fameuse odeur puis, comme je ne bougeais pas, est revenu sur le bitume où je l’ai photographié une dernière fois avant qu’il ne disparaisse. Il n’avait pas l’air inquiet », se réjouit cette lectrice de la Revue Salamandre.
Ce n’est pas la première fois que Véronique Bonnard observe l’animal. Elle l’avait déjà aperçu près de chez elle, il y environ deux ans, sans pouvoir l’identifier. Mais cette fois, photos à l’appui, elle décide de mener l’enquête pour savoir de quelle espèce il pourrait s’agir. Elle montre ses clichés à Luc Jacquemettaz, surveillant de la faune de la région Lavey-Morcles. Verdict : il s’agit d’un chacal doré, un petit canidé originaire d’une zone comprise entre l’Arabie, l’Inde et la Turquie qui colonise de lui-même l’ouest du continent européen.
« Pouvoir observer un chacal doré en direct est exceptionnel dans nos contrées. Avoir le temps de le photographier, encore plus », explique Luc Jacquemettaz. En effet, selon les données du KORA, fondation spécialisée dans le suivi des grands carnivores en Suisse, seules 20 personnes auraient eu cette chance depuis la découverte des premiers indices de présence de ce voyageur en 2011. Au total, une vingtaine de ces preuves ont été répertoriées pour un minimum de cinq individus différents, mais on parle majoritairement d’images issues de pièges photographiques et de spécimens décédés.
Un éclaireur
Pour Luc Jacquemettaz, le chacal doré de Morcles serait un solitaire qui prospecterait en vue trouver un territoire. « D’habitude, ces animaux vivent en couple fidèle ou en famille, mais pour l’instant aucune reproduction n’a eu lieu en Suisse. Les individus signalés sont encore des éclaireurs et le plus souvent des mâles », expose-t-il. Et de poursuivre : « Il n’est pas exclu qu’il s’installe dans la région, puisqu’en amateur de zones humides, ce canidé parfaitement inoffensif profite ici des rives du Rhône ainsi que de quelques étangs entourés de forêts et de surfaces ouvertes. Dans tous les cas, sa présence est une bonne nouvelle, car elle témoigne d’une riche biodiversité. »
Côté casse-croûte, le chacal n’est pas difficile. Comme son cousin le renard, c’est un omnivore opportuniste qui se satisfait aussi bien de petites proies que de baies ou de charognes. Et à en juger par les touffes de poils retrouvés par le surveillant de la faune dans les fourrés, c’est probablement un chevreuil ou un lièvre heurté par un véhicule dont se délectait notre chacal vendredi dernier.